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La Franche-Comté, terre de Hip-hop (Partie 1) : le CCUB, faire entrer les cultures urbaines dans un autre cadre que la rue

Publié le 07 Juil. 2022 à 17:07
Tags: culture |
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La Franche-Comté, terre de Hip-hop (Partie 1) : le CCUB, faire entrer les cultures urbaines dans un autre cadre que la rue
Sébastien Burlet, coordinateur du Centre des Cultures Urbaines de Besançon

La culture Hip-hop n’a pas de frontières. Depuis son émergence dans les années 1970 à New York, précisément dans le Sud du Bronx, cette culture n’a cessé de s’étendre et de s’exporter à l’étranger. Issue de la jeunesse afro-américaine, elle a été caractérisée tout d’abord par cinq pratiques fondatrices : le rap, le beatbox, le “DJing”, la danse et enfin le graffiti. Par la suite, le Hip-hop ne s’est plus limité seulement à ces formes d’art et ces éléments se sont eux mêmes émancipés de cette culture. Ces dérivés peuvent être observés aujourd'hui à travers toute la planète et même localement chez nous, en Franche-Comté, terre de Hip-hop qui reproduit certaines pratiques mais est aussi innovatrice et influence de nombreux territoires et artistes. 

Cette première partie se concentre sur une initiative unitaire qui rassemble toutes les pratiques du hip hop, exceptées celles musicales, dans un complexe : le CCUB, le Centre des Cultures Urbaines de Besançon. Avant de s’intéresser au Hip-hop graphique puis au Hip-hop musical, cet épisode décrypte comment se développent les activités physiques du Hip-hop dans notre belle région. 

 
ccub grand
 
La partie skate et bmx de l'immense espace de 2070m2 du CCUB
 

Le CCUB, un lieu à part

Cet immense espace de 2070 m2 vient enfin répondre à une demande de multiples associations qui, depuis plusieurs années, réclament un espace au sec pour exercer leurs différentes pratiques. Ces associations sont aujourd'hui au nombre de 8 à exploiter le lieu : des organismes autant de parkour, de skate, de slackline, de danse, de roller, de bmx ou encore d’arts numériques ou de graffiti. Comme nous apprend Sébastien Burlet, seul employé du centre et président de l’association de parkour des traceurs bisontins : “des bénévoles de toutes les associations sont venus aider à changer le sol de cet ancien complexe de tennis”. La ville, propriétaire de ce batiment dans le quartier de Saint Claude, a par la suite décidé d’un accord avec la maison de quartier l’ASEP dont Sébastien est le coordinateur des cultures urbaines. Toutes les constructions des différents espaces de pratique se sont faites à petit budget, “avec beaucoup de récupération, de la solidarité, avec des pratiquants qui viennent construire eux-mêmes leurs milieux comme sur le skatepark avec des bricoleurs qui ont bâti un bowl”. Après avoir enfin finalisé les travaux, l’enjeu a été aussi d’obtenir les normes de sécurité, un processus long pour avoir les normes AFNOR afin d’accueillir les pratiquants en toute sérénité.

Un fonctionnement autonome, dans la lignée des cultures urbaines

Le but était réellement de bâtir le lieu pour les associations et donc, après la construction, de laisser à ces dernières toute l’autonomie possible pour pouvoir l’exploiter. Ainsi, "chaque association a son fonctionnement et des horaires où leur espace est à disposition”. Par exemple, l’association de danse fonctionne davantage avec des cours réglementés qui rassemblent plus de 250 personnes tandis que le bmx, le parkour, le skate, même s’ils proposent également des cours, rassemblent également de nombreux adeptes en pratique libre. La demande, que ce soit pour les cours ou la pratique libre, est énorme selon Sébastien et les refus sont très nombreux : “on manque simplement de moyens, surtout humains, pour pouvoir exploiter le plein potentiel de ce lieu”. Un potentiel des cultures urbaines à Besançon qui est immense et qui s’exerce dans le CCUB, mais pas seulement, puisque l’ASEP organise également de nombreux évènements en extérieur notamment en août prochain dans le cadre de Vital’été. Aussi, l'ASEP programme des API, des animations au pied d’immeuble, qui viennent présenter des pratiques dans des quartiers. A terme, l’ambition de l’employé du CCUB est de réaliser un grand événement sur Besançon qui rassemblerait toutes les activités : “une sorte de mini festival international des sports extrêmes (FISE) comme ce qu’il se passe à Montpellier”. 

ccub danse

La salle de danse du CCUB

Les cultures urbaines, une autre manière de penser

Pour Sébastien Burlet, les cultures urbaines et le Hip-hop c’est avant tout innover, prendre un autre chemin et transmettre : “ici toutes les associations communiquent, on partage, on se donne des conseils et de nombreux pratiquants qui étaient sur une seule activité en ont essayé une autre”. Sébastien en est lui-même un bon exemple : adepte du parkour depuis ses 17 ans, pratique qu’il définit simplement par “essayer d’aller le plus vite possible d’un point à un autre”, aujourd'hui à l’âge de 27 ans, il débute le bmx depuis quelques mois et le breakdance depuis bientôt deux ans. Toutes ces cultures sont très liées et passer d’une activité à une autre s’avère aisé puisque l'ambiance est comparable : “ce sont des pratiques qui toutes viennent de la rue et on le voit, malgré cet espace, il y a cette volonté de revenir souvent à la rue, de sortir dehors”. Aussi, ce qui lie toutes ces activités, c’est l'absence de règles : “contrairement à d‘autres sports, il n’y a pas de règles définies”, les règles se redéfinissent complètement et il y a donc quelque chose de très instinctif, comme dans la pratique du graffiti. Celui-ci a été mobilisé afin de recouvrir l'entièreté des murs du CCUB. Sébastien nous raconte le travail fourni par le collectif MedlaKolor : “il y a eu un jam (session d’improvisation) de graffeur à 15-20 et ils ont recouvert les murs en 48h, jour et nuit”. La pratique du parkour est aussi instinctive pour Sébastien, qui a commencé à le pratiquer dans la forêt avant de venir à la rue : "c'est grimper dans les arbres, faire comme les gosses sans se poser de questions mais version évoluée”. 


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L'espace créatif du CCUB : atelier de graff ou de conceptions en tout genre

 

Une volonté de professionnaliser ces pratiques 

Dans les six activités pratiquées, déjà quatre sont des sports olympiques : le roller, le bmx, le breakdance et le skate. La professionnalisation de ces pratiques n’est donc plus à démontrer mais Sébastien entend encore la développer. Il espère notamment que le parkour devienne olympique prochainement, même si cela devra passer par un rapprochement avec la fédération de gymnastique “pas très éthique”. Le lien entre ces activités et le monde universitaire devient aussi de plus en plus fort puisque Sébastien intervient régulièrement chez les licences STAPS de Montbéliard et que le président de la fédération française de parkour Sidney Grosprêtre est également maître de conférence à l'Université de Besançon. Cependant, là où le directeur du CCUB aimerait progresser, c'est dans le lien avec les scolaires : “faire des initiations pour les enfants à l’école, ce serait un moyen d’avoir de la visibilité" et de la visibilité positive pour faire face au cliché sur “les traceurs (pratiquants de parkour) qui exercent seulement dans des lieux privés, sur les toits”. 


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L'espace parkour du CCUB

 

Ce CCUB est donc une aubaine pour tous les pratiquants bisontins de skate, de breakdance, de parkour qui sont légèrement délaissés par la ville, avec seulement un skatepark d'ampleur vers Chamars. Le potentiel de l’espace est immense et la volonté est de réaliser de plus en plus de spectacles et d'événements inter-activités, afin de célébrer comme il se doit le Hip-hop et les cultures urbaines, si présents à Besançon. 

 

Le podcast de la rédaction / Matéo Bonin et Sébastien Burlet