Choix du secteur :
Se connecter :
 

Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon, donnait ce matin une conférence de presse pour revenir sur plusieurs affaires en cours. Il a notamment évoqué les suites judiciaires pour des personnes majeures ayant volé et pour 5 mineurs ayant commis des dégradations.  

Dans la nuit du 29 au 30 juin, le quartier de Planoise avait été particulièrement touché par les violences urbaines à la suite de la mort de Nahel. L’agence du Crédit Mutuel, avenue Ile de France, était partie en fumée. Des magasins comme des bureaux de tabac ont été pillés. C’est pour avoir notamment fracturé la grille de l’Euromarket que 5 mineurs sont mis en examen. Parmi les 5, un est actuellement en détention provisoire du fait d’un “passé pénal léger” selon le procureur. Il sera jugé le 25 juillet prochain. 

“Une délinquance d’appropriation” pour les jeunes 

Contrairement à d’autres villes de France, Besançon n’a pas subi de dégradations de bâtiments publics, écoles, lieux symboliques. Étienne Manteaux parle ainsi davantage d’ “une délinquance d'appropriation” dans la cité franc-comtoise. Les émeutiers avaient pour objectif, selon lui, de “dévaliser” : de la nourriture dans les magasins et de l’argent liquide dans l’agence Crédit Mutuel. Aussi, toujours selon le procureur, les “vrais délinquants n’ont pas participé aux émeutes”. C’est le visionnage des réseaux sociaux, selon lui, qui a généré une “émulation” chez les jeunes. 

“Un effet d’aubaine” pour les plus âgés 

En dehors de ces 5 jeunes ayant commis les exactions principales, de nombreuses autres personnes sont mises en examen pour vol. Des personnes majeures qui ont profité d’un “effet d’aubaine” selon Etienne Manteaux. Il cite pour exemple un homme de 71 ans qui est allé “se servir en chocolats, saucissons…”. Devant les enquêteurs, le septuagénaire a évoqué “la fin du mois, un acte involontaire” et qu'il avait “complètement perdu la boule”.  Pour toutes ces personnes, des ordonnances pénales sont requises par le procureur avec la volonté d’amender fortement les coupables. “Puisque la motivation était l’enrichissement illégal, la réponse judiciaire doit être pécuniaire”. 

 

Les investigations se poursuivent encore avec l’exploitation des caméras de surveillance. Comme évoqué précédemment, “toutes les personnes qui seront reconnus à visage découvert en infraction seront poursuivies” affirme le procureur de la République. 

 

Le podcast de la rédaction / Etienne Manteaux    

Ce mardi, une opération des douanes était menée au centre de tri La Poste à Besançon. Des centaines de colis ont été inspectés. Les agents avaient une mission principale : lutter contre l’importation de feux d’artifices et de mortier, dont la détention et la vente sont actuellement prohibées par le gouvernement. Les douaniers en ont aussi profité pour contrôler d’autres marchandises, comme des stupéfiants et des contrefaçons.

 

 

16h. L’imposant camion manœuvre devant l’entrée du hangar du centre de tri. La semi-remorque s’ouvre, dévoilant une masse impressionnante de paquets. « Plus de 3000 colis aujourd’hui » indique cet homme prêt à décharger la marchandise sur le tapis roulant. « Et je ne vous explique pas pendant les périodes de fête, la quantité est doublée, le camion est bien plus chargé ! » poursuit-il. Au bout de la chaîne, armés de cutters et de gants, une dizaine de douaniers, parés à inspecter chaque colis, qu’ils n’hésiteront pas à ouvrir en cas de doute. Une opération qui vise à lutter contre l’importation de feux d’artifice et de mortier dont la détention, l’utilisation et la vente sont actuellement interdites par décret du 8 juillet jusqu’au 15 juillet inclus. À l’approche du traditionnel 14 juillet, les forces de l’ordre multiplient les contrôles pour s’assurer que cette décision soit respectée. Depuis le drame survenu à Nanterre il y a quelques semaines, cet homicide commis par un policier sur le jeune Nahël lors d’un contrôle routier, des mortiers ont été dirigés contre les forces de l’ordre pendant les longues nuits d’émeutes.

Les colis défilent les uns après les autres sur les rouages du tapis roulant. Ils sont scrupuleusement inspectés par les douaniers. Provenance, poids, emballage, la marchandise est manipulée, et en cas de doute, déballée. Premier contenu suspect : des habits de marque, sous-vêtements, t-shirts, casquettes et paire de chaussure. Une étiquette chinoise, un expéditeur qui laisse les douaniers circonspects, le colis est mis à l’écart afin d’être contrôlé plus rigoureusement. Quelques minutes plus tard, nouvelle trouvaille pour les douaniers. Un carton qui contient une cartouche de cigarette et un pot de tabac à rouler, tout droit venu du Luxembourg. Très vite, grâce au paquetage, à l’étiquette, et leur expérience dans ce domaine, les douaniers sont formels : il s’agit de tabac de contrebande. La marchandise est interceptée.

 

 

Quelques minutes plus tard, Marki, le labrador de détection des douaniers, s’agite près d’un rack. Les agents éloignent alors le chien, disposent l’intégralité des colis au sol, avant de laisser à nouveau le canidé faire son job. Ni une ni deux, Marki pose la patte sur un premier carton et se met à mordiller une extrémité. La marchandise est saisie, ouverte. Bingo. Guidé par son fabuleux flair, le labrador ne s’est pas trompé, les douaniers mettent la main sur un carton rempli de feux d’artifices. Immédiatement, Marki se remet au travail, et décèle à nouveau un colis suspect. A l’intérieur, des produits qui interrogent les agents. Briquets, feuilles à rouler, pochette avec des feuilles de cannabis… et trois petits sachets contenant de la résine. Pas de panique, il s’agit cette fois de CBD, un dérivé autorisé en France. Les douaniers inspectent tout de même scrupuleusement les factures, la société expéditrice et les produits. Tout semble en règle.

 

 

L’opération se poursuit, et peu de colis « illégaux » ne tombent finalement entre les mains des forces de l’ordre. Si ce n’est ce long carton qui interroge. Et quelle ne fut pas la surprise des douaniers et des journalistes présents, lorsqu’ils déballèrent un objet s’apparentant à un canon de fusil. Très vite un agent se veut rassurant. « L’achat d’arme en ligne est autorisé quand il suit évidemment toutes les règles. Il s’agit là d’un canon interchangeable d’une carabine 22 long rifle à première vue. Une arme de loisir et de tir sportif ». Les douaniers passent au crible pendant de longues minutes les papiers soigneusement placés à l’intérieur du carton. Identité, permis de chasse et de port d’arme, factures, une fois de plus, tout est réglo.

Sous un temps orageux dépassant les 30°, la chaleur règne au sein de l’entrepôt. Les gouttes de sueur coulent le long des visages, les jeunes travailleurs intérimaires enchaînent les bouteilles d’eau fraîche, Marki le labrador a la gueule ouverte, laisse trainer sa langue. « Par ces temps très chauds, son autonomie est diminuée et on le fait travailler bien moins longtemps qu’à l’accoutumée » indique son maître. Mais les colis se suivent et se succèdent toujours. « Et voilà ! » s’écrie soudainement un douanier au loin. « Mortier ! » ajoute-t-il. Très vite, son équipe se masse autour de lui, les caméras s’approchent. L’agent dévoile son butin. Une caisse remplie de multiples articles pyrotechniques, sans justificatif national et sans facture, circulant en fret express, en provenance de Pologne. « Ce ne sont pas des gros pétards, mais ils produisent beaucoup d’étincelles et font énormément de bruit. Ils peuvent aussi être utilisés pour confectionner des engins explosifs de plus grande envergure » précise le douanier. Bien évidemment, l’intégralité de la marchandise est confisquée par les forces de l’ordre.

 

Pour rappel, jusqu’au 15 juillet inclus, la vente, le port et le transport d’engins pyrotechniques et d’artifices sur l’ensemble du territoire sont interdits par le gouvernement. Une dérogation est uniquement prévue au bénéfice des professionnels disposant des agréments et habilitations requis et au bénéfice des collectivités publiques.

 

Des violences urbaines ont éclaté dans certains quartiers de Besançon, comme dans le reste de la France, suite à la mort de Nahel. Le quartier prioritaire de Planoise a été particulièrement touché. Alors, comment comprendre cette colère et agir à long terme pour une jeunesse et un quartier souvent enclavés ? 

Tentatives de réponses dans ce dossier avec, en troisième partie, le témoignage d’une professeure, Sandrine Cadon, exerçant à Planoise au lycée Tristan Bernard. 

Vous pouvez aussi découvrir les deux premiers épisodes sur l’association Miroirs du monde et le Club Sauvegarde

“Comment je vois mes élèves ? Bah c’est des adolescents”

Le lycée professionnel Tristan Bernard accueille 450 élèves pour 52 professeurs. Le profil de recrutement est varié. Il se fait dans le quartier mais aussi dans les communes environnantes. Sandrine Cadon, qui exerce depuis 27 ans dans cet établissement, affirme que ses élèves “viennent bien volontiers au lycée, ils s’y sentent bien”. “C’est des adolescents tout simplement, mais avec des conditions familiales souvent particulières”. Elle concède que l’autonomie est moins importante qu’en lycée général : “les élèves s'enfuient à la sonnerie”. La professeure d’arts plastiques, syndiquée à la CGT, rejette l’analyse de l’Education Nationale qui, selon elle, est idéaliste. “On pense que chaque élève a son petit bureau et du temps pour travailler le soir. La réalité c’est que, quand ils rentrent, ils doivent s’occuper d’une famille et n’ont pas les conditions pour étudier”. 

“On est plus souvent dans l’émotion que l’apprentissage”

Ces situations familiales et sociales empêchent le rythme de travail, mais aussi les activités extra-scolaires. Sandrine Cadon observe que, en dehors des internes, de moins en moins d’élèves viennent aux sorties organisées au théâtre ou au cinéma. La nouvelle réforme du lycée professionnel “a des aspects intéressants” selon elle, comme le retour d’une année supplémentaire, “mais seulement pour une faible part d’élèves voulant s’engager dans le supérieur”. Globalement, l’enseignante expérimentée voit dans la baisse des moyens et l'augmentation du nombre d’élèves par classe les causes du niveau important de décrochage scolaire. 

“Il faut redonner confiance à l’école” conclut Sandrine Cadon. 

 

Le podcast de la rédaction / Sandrine Cadon    

Mardi, la maire de Besançon était invitée, avec 200 autres maires de toute la France, par le président de la République, pour évoquer la colère qui secoue le pays après la mort de Nahel. 

Dans un communiqué, celle-ci a déclaré que “les annonces et les débats n’ont pas été à la hauteur du déchaînement de colère et de violence qu’a traversé notre pays”. 

L’élue bisontine dénonce “une ségrégation spatiale” qui s’est construite et “qui concerne la différenciation entre les quartiers mais aussi une ruralité qui se sent abandonnée”. 

Elle argue que ce constat ne date pas d’hier et que les “plans sectoriels successifs n’ont pas eu véritablement le temps de se déployer”. On peut penser au plan Borloo, rejeté en 2018 par Emmanuel Macron, et qui est aujourd’hui proclamé par de nombreux maires de banlieues comme une potentielle solution non prise en compte. 

La maire de Besançon tente de trouver des solutions à son échelle. Anne Vignot et son équipe organisent, aujourd’hui, une rencontre à huis clos avec des acteurs associatifs pour initier un “plan d’action pour la jeunesse et la parentalité”. Même si elle attend toujours que l’Etat “l’accompagne dans ses démarches”. 

Depuis jeudi dernier, des violences urbaines éclatent dans certains quartiers de Besançon, comme dans le reste de la France, suite à la mort de Nahel. Le quartier prioritaire de Planoise est particulièrement touché. Alors, comment comprendre cette colère et agir à long terme pour que cette situation structurelle ne se reproduise pas ? 

Tentatives de réponses dans ce dossier avec, en première partie Fodé Ndao, champion de karaté et fondateur du Club Sauvegarde. 

 

Réfléchir, avant tout. C’est ce que Fodé Ndao ne cesse de répéter aux jeunes qu’il encadre et à son propre fils. On le rencontre au 6 rue Pablo Picasso, le Club Sauvegarde, en plein cœur du quartier de Planoise. Avant de mener l’interview, le champion de karaté nous demande quelques minutes pour régler un conflit à propos d’une sortie au lac avortée au sein du club. Pour comprendre les tensions, la recette est simple : écouter, chacun, chacune. Avant d’émettre un quelconque avis, Fodé veut entendre tout le monde isolément. 

Cet exemple met en lumière l’avis et la philosophie de vie du karatéka qui “voit dans le sport les valeurs fédératrices” d’où peuvent émerger la paix. 

Le sport, une visée éducative

Fodé est vice-champion du monde de karaté et plusieurs fois champion d’Afrique. Véritable légende dans son quartier et dans son pays d’origine, le Sénégal, il veut mettre à profit son expérience pour éduquer les jeunes. Dans son Club Sauvegarde, fondé en 2003, il discute tous les jours avec des mineurs et essaie d’initier chez eux des réflexions, sans imposer son point de vue. Le sport, pour lui, “n’est pas politique”. Éloigné de ces considérations, il peut avoir des “valeurs éducatives” avec les moments de partage qu’il suscite. Quand on lui demande si l’Etat est assez présent pour l’aider dans son action, nécessaire et bénéfique dans ce quartier, Fodé affirme : “il ne faut pas toujours se demander ce que l’Etat peut faire pour nous, il faut aussi se demander ce que l’on peut faire pour l’Etat”. Il remercie les collectivités pour leur aide financière mais estime que c’est par les relations humaines, avant tout, que la société peut sortir par le haut.

Préférer la responsabilité de chacun à la responsabilité des parents

On entend beaucoup dans les médias que la responsabilité de ces violences, réalisées par des très jeunes, revient en premier ordre aux parents. Fodé préfère imputer un rôle à toute la société qu’il voit “comme un village”. “Le village, c’est le boulanger, le voisin, le passant, l'instituteur qui doit être respecté par tout le quartier”. Chaque personne sur le passage d’un jeune le construit. Et quant au rôle des “grands frères”, c’est un terme fondé politiquement selon lui. La responsabilité doit être collective pour Fodé et la solution dans le dialogue. 

“Les violences, on ne les traite pas, on les juge”

Ce dialogue, il ne peut être seulement répressif et Fodé déplore le jugement de ces violences, sans compréhension. Dans ses actions, comme avec l’initiative des caravanes des pieds d’immeubles qui débute dès ce lundi 10 juillet, il prône le dialogue. Cet évènement, qui présente des activités sportives aux jeunes, durera près de deux mois dans six quartiers différents de Planoise. Il est réalisé en collaboration avec le Centre de loisirs de jeunes de la Police Nationale.

 

Le podcast de la rédaction/ Fodé Ndao  

Demain, cela fera une semaine que Nahël a été tué lors d’un contrôle de police à Nanterre. Depuis ce drame, chaque soir, des émeutes enflamment les quartiers dans toute la France. A Besançon, des incidents ont éclaté particulièrement dans les quartiers de Planoise et Clairs-Soleil. Une agence bancaire a été brûlée, des feux ont été déclenchés sur la route, des véhicules ont été incendiés et quelques boutiques ont été pillées. Le parquet de Besançon est très clair : des interpellations auront lieu très prochainement.

 

« Je peux vous assurer qu'il y aura des poursuite »

Cette vague de violences ne laisse pas les forces de l’ordre impassibles. Elles ont déjà procédé à une saisie impressionnante ce vendredi, dans le quartier de Planoise, en confisquant 54.000 mortiers et artifices dans un commerce de la place Cassin. Etienne Manteaux, le procureur de la République de Besançon, tenait une conférence de presse ce lundi matin, pour assurer que le maximum sera fait afin d'identifier les auteurs de ces incivilités. Il a rappelé les faits les plus graves, survenus dans la nuit de jeudi à vendredi, comme l’incendie de l’agence bancaire Crédit Mutuel ainsi que le pillage de l’Euro Market et d’un débit de tabac. S’il n’y a pas eu d’interpellation le soir des faits, les policiers n’étant pas en nombre suffisant, Etienne Manteaux a bien précisé qu’il y en aurait très prochainement. Pour l’heure, les caméras et la vidéosurveillance sont analysées par les enquêteurs de la police judiciaire et de la sûreté départementale. « Cela va nous permettre d’élucider et d’identifier très clairement certains faits. Dans les jours et semaines à venir, au fur et à mesure de l’identification formelle de certains auteurs de ces dégradations par incendie, de ces vols aggravés par plusieurs circonstances, je peux vous assurer qu’il y aura des poursuites. Nous allons procéder à des interpellations » promet Etienne Manteaux. Pour rappel, les dégradations par incendie ou vols aggravés par trois circonstances sont punis de dix ans d’emprisonnement.

 

Etienne Manteaux, le procureur de la République de Besançon : 

 

 

Les parents, civilement responsables, cités devant le tribunal

Actuellement, 9 individus ont été interpellés dans la nuit de vendredi à samedi et 4 dans la nuit de samedi à dimanche. Un homme en possession de masques et d’engins pyrotechniques a été placé en garde à vue. Deux mineurs à proximité d’un véhicule incendié ont aussi été interpellés. D'abord pris en chasse, l’un d’entre eux a laissé échapper une bouteille d’essence lors de sa fuite. Les policiers, après les avoir rattrapés, ont aussi constaté des traces de brûlures au niveau du visage de l'un de ces individus. Des adolescents très jeunes, inconnus de la justice, qui seront présentés à un juge pour enfant en présence de leurs parents. Ces deniers auraient été motivés par l’élan grandissant des réseaux sociaux. Mais Etienne Manteaux prévient : « Les parents sont civilement responsables. À ce titre, ils seront cités devant le tribunal. On ne peut pas impunément casser et violenter. Les parents ont des obligations »

 

Suite aux violences urbaines survenues hier soir à Besançon, la ville, par mesure de précaution, a décidé de fermer tous les équipements publics des quartiers de Planoise, Clairs-Soleils, Montrapon et Battant aujourd’hui à partir de 17h jusqu’à demain matin, à l’exception du périscolaire et des crèches.  

Des perturbations sont également à prévoir sur les transports, avec l'arrêt de la circulation du tram à 18h30 et des modifications dans les itinéraires des bus.