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Sous la pression des éleveurs, une cinquantaine de pays se sont mis d'accord mardi à Strasbourg pour abaisser la protection du loup en Europe. Plus précisément, la Convention de Berne a approuvé un déclassement du statut de protection du loup, qui va passer d’espèce « strictement protégée » à « protégée ». Cette décision pourrait faciliter son abattage. Les défenseurs des animaux dénoncent "une décision politique et purement démagogique"

En Suisse voisine, dans le Val-de-Travers, dans la nuit du 5 au 6 octobre, les agents de la police de la faune ont tiré sur un loup isolé, au lieu-dit Mont de Boveresse. Le tir s'est déroulé sur les lieux de l'attaque constatée la veille, au cours de laquelle une génisse a été tuée. « Selon toute vraisemblance, il s'agit de l'auteur des deux attaques qui ont récemment eu lieu au Val-de-Travers, dans des pâturages très proches l'un de l'autre » expliquent les autorités suisses. Sa dépouille a été transportée  à l'Hôpital vétérinaire de l'Université de Berne pour expertise, comme le prévoit la procédure. 

L'Union européenne donne son feu vert pour une protection réduite du loup. L’instance entend ainsi passer d'une "protection stricte" à une "protection simple". Et ce, afin de  réduire plus facilement la population de loups quand elle sera jugée trop nombreuse  sur un territoire, via l'attribution de quotas de chasse. La proposition qui permettrait d’abattre plus de loups, doit encore être approuvée au sein de la Convention de Berne sur la conservation de la vie sauvage.

Cinq associations environnementales demandent au Conseil d’Etat d’annuler les règles de tirs de régulation du loup, qui ont été assouplies par le gouvernement, le 23 février dernier,  pour lutter contre les prédations sur les troupeaux. Leur nombre aurait doublé depuis 2018. Au 12 septembre, 148 loups ont été tués. Plus de 12.000 bêtes auraient été attaquées en 2022. Rappelons que deux loups ont dernièrement été tués sur le territoire de Mouthe.

L’info ne fait pas que des heureux. En Suisse, dans le canton de Vaud, la meute de sept loups du Mont Tendre dans le massif du Jura va pouvoir être abattue. Il s’agit d’une première. Jamais une meute entière n’a été menacée ainsi dans le canton. L’objectif consiste, dans un premier temps, à se concentrer sur le mâle géniteur et observer, après les faits, comment se comporte la meute en l’absence de son  chef de file. Ce dernier serait responsable de la disparition de plusieurs jeunes bovins.

Dans un communiqué de presse, la Préfecture du Doubs indique que ce vendredi 6 septembre, vers 23h45, un binôme de lieutenants de louveterie a procédé à l’abattage d’un loup au cours d’une opération de défense d’un troupeau de bovins situé à Mouthe. Selon le communiqué préfectoral, « ce tir a été mis en œuvre alors que 3 loups étaient observés en situation d’attaque sur le troupeau concerné ».

Il s’agit du deuxième loup abattu dans le cadre d’opérations de défense de troupeau depuis le début de l’année dans le département du Doubs. Depuis février 2024, 16 attaques ont été recensées dans le département, dont 5 sur la commune de Mouthe. Plusieurs dizaines de bovins ont été blessés ou tués.

Ce mercredi matin, Marc Fesneau, le ministre de l’Agriculture, a indiqué qu’un arrêté sera publié, d’ici la fin de semaine, pour la mise en application d’un protocole régissant les tirs sur les loups menaçant les troupeaux, répondant ainsi à une demande qui avait été exprimée par « beaucoup d’éleveurs ».

Le Conseil fédéral a pris la décision d’autoriser, à compter du 1er décembre, les tirs de loup préventifs. Ils ne pourront être utilisés que si la meute représente un danger ou a causé des dégâts. Ils ne seront utilisés qu’entre le 1er septembre et le 31 janvier. Il est précisé que ces tirs seront soumis à l’autorisation de l’Office fédéral de l’environnement. Ces tirs pourront être autorisés l’été, mais sous certaines conditions.

En fin de semaine dernière, une nouvelle attaque de loup s’est produite dans le département du Doubs. Une vache a été attaquée par le prédateur à Chapelle-des-Bois. Il s’agit de la huitième attaque référencée sur le territoire  depuis le 13 juillet dernier.  Quelques jours après la présentation du plan loup, Florent Dornier, le président de la FDSEA du Doubs, attend une évolution du document afin qu’il soit le plus proche des préoccupations et des attentes des éleveurs.

La protection des troupeaux bovins est très insuffisante pour l’agriculteur. Il attend également des mesures plus franches dans les domaines des tirs et dans la publication d’un budget précis quant à l’accompagnement social des éleveurs. « C’est un plan loup en demi-teinte. Nous sommes mobilisés au sein de la FDSEA et la FNSEA pour le faire évoluer » poursuit M. Dornier. Et de conclure : « notre objectif est d’arriver, d’ici la fin de l’automne,  à obtenir des avancées significatives ».

Encore deux mois de pâturage

Si l’on se réfère à ce qui s’est passé l’an dernier, les animaux devraient occupés les prairies pendant deux mois encore, jusqu’au 1er décembre. Les conditions climatiques permettent cette prolongation, avec un redémarrage de la pousse de l’herbe  durant cette période.  Si l’on peut se féliciter de cette situation, elle reste néanmoins source d’inquiétude pour les agriculteurs, dont le cheptel reste sous la menace de potentielles attaques.

L'interview de la rédaction : Forent Dornier, président de la FDSEA du Doubs

 

Le gouvernement a dévoilé son nouveau plan loup 2024-2029 ce lundi à Lyon. Un plan qui a provoqué aussi bien la colère des associations de protection de la nature et des éleveurs. A l’issue de cette présentation, les associations de l’environnement et de la biodiversité ont même décidé de quitter le Groupe National Loup (GNL).

C’est lors d’une réunion à huis clos, à Lyon, que ce nouveau document été officiellement présenté par la préfecture de la région Auvergne-Rhône-Alpes aux membres du Groupe national Loup, dans lequel on retrouve notamment des associations de protection de la nature, des représentants du monde agricole, des élus ou encore des chasseurs. Mais ce lundi, bon nombre d’entre eux sont sorti déçus de cette rencontre. A commencer par les associations de l’environnement et de la biodiversité qui dénoncent un « plan pour l’élevage ». Denis Doublet, vice-président de Ferus, fait part de sa consternation. « Je suis tombé des nues. C’est un document qui est bâclé, qui est déséquilibré, qui n’a rien d’un plan national d’action en faveur d’une espèce […] C’est finalement un plan en faveur de l’élevage. C’est une immense déception. »

« Que les éleveurs puissent protéger leurs troupeaux, c’est absolument nécessaire. Ferus participe d’ailleurs à cette protection depuis plus de 20 ans, avec son programme Pastoraloup. Et on accepte, peut-être du bout des lèvres, qu’il y ait des tirs dérogatoires. Mais ces tirs doivent être l’extrême limite, quand on est absolument certain que tous les moyens ont été mis en place, sans fonctionner. Eventuellement, dans ce cas, on peut tirer un loup. Mais on n’est en plus là. C’est presque de la régulation, du prélèvement » déplore Denis Doublet. Ce plan loup 2024-2029 contient 42 principales mesures, dont certaines qui ont fait bondir les défenseurs de la nature. L’une d’entre elles est la simplification des tirs. Elle prévoit notamment un renforcement des prélèvements en début de saison, de façon à limiter les attaques durant la période d’estive. Le plan national d'action donne aussi la possibilité d’avoir deux tireurs sur le tir de défense simple, voire trois de manière exceptionnelle, après autorisation du préfet, selon critères objectifs comme la taille de l’estive. Par ailleurs, les louvetiers, qui pourront être déployés dans les 48 heures après une attaque, n’auront plus l’obligation d’éclairer avant les tirs, et pourront être dotés de lunettes thermiques quelque que soit le tir. Les éleveurs et les chasseurs pourront aussi bénéficier de matériel de vision nocturne. Les éleveurs pourront même être formés à la louveterie, afin qu’ils puissent accéder à des équipements dédiés. Enfin, le plan loup prévoit une augmentation du taux de prélèvement sur la période 2024-2029, si l’évolution de la population lupine le permet (possibilité de passer à 20 ou 21% de prélèvements en plafond). Actuellement 19% de la population de loups pouvait être abattue.

« On est dans une réelle augmentation des tirs, voire des prélèvements, avec un plafond qui ne tiendra pas longtemps. On est actuellement à 209, en fonction des chiffres des services de l’OFB, avec une estimation provisoire de 1104 loups. Mais quand en début de saison, il y aura au moins 150 loups tirés, à l’aide des 2700 arrêtés préfectoraux de tirs de défenses simple, et que l’on va très vite atteindre le plafond, que se passera-t-il ensuite ? Parce que le loup n’attaque pas les troupeaux uniquement lorsqu’ils sont en estive » questionne Denis Doublet.

 

Un changement de statut du loup ?

Outre cette intensification des tirs, les associations de l’environnement et de la biodiversité s’insurgent du souhait de reclasser l’espèce de « strictement protégée » à « protégée », au niveau international et européen, pour passer d’une logique de réaction (défense) à une logique de gestion (prévention). La goutte d’eau pour l'association Ferus, qui l’a mené à claquer la porte de la présentation de ce nouveau plan loup. « Ce qui veut dire qu’ensuite, une gestion cynégétique du loup pourrait être mise en place. Le loup deviendra une espèce chassable. On marche sur la tête. Autant dire, ce n’est plus le plan national loup et activités d’élevage. C’est un plan de sauvegarde du pastoralisme. Je ne vois pas comment des associations pouvaient accepter cela. C’est un gâchis de l’Etat. Il a cassé une dynamique » déplore Denis Doublet.

 

Mieux compter, mieux indemniser, et mieux protéger ?

Ce plan prévoit, entre autres, un recensement plus efficacement la population de loups, en appliquant « une nouvelle méthode d’évaluation de la population robuste scientifiquement, susceptible de nourrir la confiance entre les acteurs concernés par le loup et adaptée à un renforcement de la coopération européenne, tout en évaluant la viabilité génétique à l’échelle européenne de la population lupine". Le plan devrait aussi permettre une meilleure prise en compte des dommages indirects subis par les éleveurs du fait des attaques (pertes génétiques, avortements, disparition, etc.) et les éleveurs seront indemnisés sous 125 jours avec un accompagnement qui leur sera proposé. Enfin, ce nouveau plan prévoit une amplification de la recherche sur les moyens de protection des troupeaux, avec un budget de 2,5M€ sur la période 2024-2029. Un statut du chien de protection de troupeaux doit voir le jour, ainsi qu'une organisation de la filière de production des chiens.