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Rachida Dati à la culture : Les interrogations des acteurs culturels

Publié le 12 Jan. 2024 à 15:01
Tags: Politique | culture |
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Rachida Dati à la culture : Les interrogations des acteurs culturels Patrick Colle

La nomination de Rachida Dati à la tête du ministère de la culture en a surpris plus d’un. En premier lieu, les premiers concernés, les acteurs du monde culturel. S’ils ne veulent pas se montrer trop durs et se donner le temps nécessaire pour se forger une opinion factuelle, ils ne cachent pas leurs inquiétudes et leurs interrogations. Ils y voient un coup politique d’Emmanuel Macron, qui pourrait les desservir. Eux qui se battent au quotidien pour diffuser la culture au plus grand nombre. Conscients des valeurs qu’elle véhicule, notamment dans le vivre ensemble et l’éducation. Rencontre avec Patrick Colle, le président du cinéma Club Jacques Becker de Pontarlier.

 Quel regard portez-vous sur la nomination de Rachida Dati ?

On est inquiet. On est surpris car c’est la première fois que l’on entend cette dame évoquer la problématique culturelle. L’arrivée de Rachida Dati est un questionnement très fort. Ce matin, dans son discours, elle a évoqué des choses très fortes quant à sa propre personne. Elle disait devoir tout à la France, à l’éducation et à la culture. C’est une bonne prise conscience. C’est une bonne analyse. J’ai envie de dire : « chiche ». Néanmoins, j’ai peur que ce ne soit que des mots. Cette politique répond à un enjeu de chaise musicale. On est bien loin de la culture.

Quelles sont les personnalités qui vous ont marquées ?

Pour moi, il y a deux noms qui sortent. Il y a Malraux, qui a redonné à la culture une vocation de formation de la personne et du citoyen, et Jack Lang. A un moment donné, ce dernier a été ministre de l’éducation et de la culture en même temps. On conjuguait enfin quelque chose d’intéressant. L’un ne va pas sans l’autre. Au-delà des couleurs politiques, ils ont donné à la culture toute sa dimension dans le développement de la personne et de son esprit critique. Est-ce que Rachida Dati va pouvoir s’opposer à Bolloré ? Est-ce qu’elle sera dans une certaine autonomie ? Est-ce qu’elle aura une marge de manœuvre ? Cela fait dix ans que les subventions des structures culturelles ont baissé de moitié.

Ce n’est pas un très bon signal qui a été donné par le duo Macron/ Attal ?

C’est un coup de théâtre. Si on est que sur des effets de manche et des mots, c’est n’importe quoi. La culture représente 0,5% du budget national.

Allez-vous faire remonter cette inquiétude, cet étonnement aux plus hautes instances de l’état ?

Ce matin, devant les caméras, Rachida Dati a appuyé sur ce qu’elle devait à la France et sur une éducation populaire digne de ce nom. Nous partageons à 100% le propos tenu.  Comment, désormais, concrètement, ces paroles vont nous amener vers un quotidien ouvert à cette approche-là ? A notre échelle, cela fait des années que l’on parle d’éducation populaire et que l’on essaie de vivre une éducation populaire. Si nous laissons les billets d’entrée de nos spectacles à 5 ou 6 euros, et pas à 12 ou 14 euros, c’est pour permettre aux personnes les plus en difficulté d’y avoir accès. S’il n’y a pas les subventions et l’appui des politiques et de l’état, nous crèverons.

D’autant plus qu’il n’y a pas d’éducation sans culture

Quand je montre un film kazakh ou quand je développe l’approche d’un film des pays de l’Est, du Maghreb ou d’Afrique Noir, je permets aux gens d’apprivoiser une autre façon de concevoir le monde. C’est cette diversité qui fait société.

L'interview de la rédaction / Patrick Colle, président du cinéma Club Jacques Becker de Pontarlier