Choix du secteur :
Se connecter :

À Ornans, le paysage en mouvement : entre marche, mémoire et matière

Publié le 27 Jui. 2025 à 08:06
Tags: culture | musee courbet |
Lecture: min
À Ornans, le paysage en mouvement : entre marche, mémoire et matière Pierre Wat, historien de l'art à Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Deux expositions, présentées actuellement au Musée Gustave Courbet et à l’atelier du peintre, invitent à une immersion contemplative dans le paysage, à travers les pas des peintres du XIXe siècle et le regard contemporain d’Eva Jospin. Dans le calme d’Ornans, le musée Courbet propose une exposition aussi riche que sensible : "Paysages de marche. Dans les traces de Rousseau, Courbet, Renoir, Cézanne et les autres", une réflexion sur la marche comme expérience esthétique et philosophique, rythmée par le souffle du XIXe siècle. En écho, l’artiste contemporaine Eva Jospin investit l’atelier du peintre, dans une carte blanche nourrie d’échos boisés, de forêts sculptées et de résonances intimes avec l’œuvre du maître de la Loue.

L'interview de la rédaction : Benjamin Foudral 

Marcher, créer, penser : un paysage habité

« Les grandes idées viennent en marchant », écrivait Nietzsche. Cette maxime aurait pu servir d’épigraphe à l’exposition "Paysages de marche", dont le commissariat est assuré par Pierre Watt, historien de l’art, professeur d'hsitoire de l'art à l'université Paris 1 Panthéon - Sorbonne. L’exposition explore la marche non comme simple déplacement, mais comme geste créateur, expérience sensorielle et philosophie incarnée. Divisée en stations thématiques – de l’errance volontaire au "cheminement du familier", de la frontière entre ville et campagne à la marche dans l’inconnu – l’exposition retrace la manière dont les artistes du XIXe siècle ont arpenté le monde pour mieux le représenter. Elle rend hommage à cette expérience physique du paysage, opposée à la frénésie contemporaine du regard. « La peinture n’est pas une image qu’on scrolle du pouce », insiste Pierre Watt. « Elle donne du temps, il faut lui rendre du temps. ». 

 L'interview de la rédaction : Pierre Wat 

 

courbet tableau coudral wat

Photo : Benjamin Foudral, directeur et conservateur du musée et pôle Courbet et Pierre Wat; historien de l'art à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. 

 

Une scénographie pensée comme une déambulation

La scénographie accompagne cette lenteur revendiquée. Volumes, couleurs, clairs-obscurs rythment la pérégrination du visiteur, dans un parcours à la fois sensoriel et intellectuel. Parmi les quelque soixante œuvres exposées, issues des collections du Louvre, du musée d’Orsay ou encore d’institutions régionales, les chefs-d’œuvre de Courbet, Renoir ou Cézanne dialoguent avec des œuvres moins connues, parfois inédites. Des objets insolites – palettes de voyage, chaussures d’alpiniste, piolets – rappellent la dimension humaine et corporelle de la création. L’exposition célèbre aussi la photographie du XIXe siècle, elle-même pratique de la lenteur et de l'observation attentive. Le tout forme un parcours riche mais volontairement épuré, presque méditatif.

 

courbet tableau errer

 

Eva Jospin, une résonance contemporaine dans l’atelier de Courbet

À quelques pas du musée, l’atelier de Gustave Courbet, restauré et ouvert au public, devient le théâtre d’une carte blanche donnée à Eva Jospin. L’artiste, connue pour ses forêts sculptées en carton, y propose une exposition intime, conçue en résonance avec les paysages et les thèmes chers à Courbet : la grotte, la forêt, la minéralité. « Cet atelier, ce n’est pas un musée. C’est un lieu habité par un peintre qui y revenait après ses marches pour transformer son expérience en peinture », explique Eva Jospin. Dans ce lieu de mémoire vivante, elle installe des bas-reliefs, sculptures, dessins et broderies, pensés pour le dialogue. « Il s’agit d’un échange permanent entre le passé et le présent, une conversation que les artistes n’interrompent jamais. ». 

 

Un dialogue vivant entre art, nature et territoire

Les deux expositions s’inscrivent dans une programmation thématique autour de "l’art et la nature", déployée sur les différents sites du pôle muséal d’Ornans, dont la ferme familiale de Flagey qui accueille l’artiste Hélène Cambalveis. Ensemble, ces projets tissent un récit cohérent, entre patrimoine et création vivante, entre mémoire du territoire et regard d’aujourd’hui. À travers la marche, l’exposition interroge notre relation au paysage, au temps, à la création. Elle propose un antidote à la vitesse, une invitation à la contemplation. Et rappelle, selon les mots d’Eva Jospin, que « l’art est un mouvement permanent – un dialogue entre aujourd’hui, le passé et ce qui va venir ».

 L'interview de la rédaction : Eva Jospin 

 

COURBET GROTTE

Photo : Oeuvre de l'artiste Eva Jospin 

 

Info pratiques

"Paysages de marche. Dans les traces de Rousseau, Courbet, Renoir, Cézanne et les autres" et "Eva Jospin – Carte blanche à l’atelier Courbet" sont à découvrir  du 28 juin, et jusqu’au 19 octobre au  Musée Courbet et à l’atelier du peibtre.

Dernière modification le vendredi, 27 juin 2025 15:17