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La nouvelle exposition du musée du Temps retrace les 110 ans d'existence de Lip. Intitulée « LIP.ologie, une histoire horlogère », elle revient sur l'évolution de la marque, de l'Atelier Lipmann, créé en 1867 en centre-ville, à son développement en manufacture à la Mouillère dès 1902, puis à son implantation à Palente dans une usine de 24.000m2 ultramoderne à l'époque. L'exposition évoque également la lutte ouvrière, la fameuse « affaire Lip », survenue il y a tout juste 50 ans. Élaborée par les Archives départementales du Doubs, cette exposition présente la collection du musée du Temps, constituée au fil des années depuis 1970.

 

Cette exposition s’inscrit dans les célébrations du cinquantenaire de l’affaire Lip. Mais au-delà du conflit lui-même, l’exposition LIP.ologie s’interroge sur ce qui a fait de Lip un nom marquant et emblématique. Aujourd'hui encore, citée en France dans le top 5 des marques de montres, et 40 ans après sa fermeture, Lip voit sa mythologie exposée à Besançon. Des montres précises et accessibles à toutes et tous, une communication inventive, des innovations techniques et des usines ultra modernes, des dirigeants atypiques, sans oublier une identité forte partagée par ses salariés : tout ceci confère à la marque une place à part dans l’histoire de l’horlogerie française, et particulièrement dans le cœur des bisontins.

 

« On a souhaité élargir et expliquer en quoi Lip, une entreprise qui a vécu 110 ans, est une entreprise emblématique à bien plus d'un titre. Pas uniquement le conflit lui-même, mais également le côté visionnaire de ses dirigeants, la politique très innovante en matière de communication, la production avec des modèles iconiques que beaucoup de français ont eu, comme le T18 ou la Dauphine. C'est un large panorama qu'on donne à voir, pour comprendre aussi pourquoi cette affaire Lip a eu tant de retentissements Â» Laurence Reibel, conservateur en chef du musée du Temps.

 

 

Chacun est légitime à voir Lip de son point de vue. C’est également le parti pris de cette exposition. LIP.ologie est à l’image de la collection du musée du Temps : représentative mais non exhaustive. Elle se décline au fil de chapitres, détaillant l’histoire de l’entreprise. Cette exposition est une porte ouverte sur des recherches à poursuivre, une histoire à compléter, pour rendre compte de la vie de l’entreprise, de sa production et de ses ouvriers. « 10 millions de français avaient une Lip, c’est impressionnant. On espère apporter notre petite pierre à l'édifice, et surtout inciter les chercheurs, les universitaires, les étudiants à s'intéresser à cette histoire. Parce qu'on parle beaucoup du conflit, mais toute l’histoire de Lip, dans sa globalité, contribue énormément à la connaissance et à comprendre pourquoi ce conflit a été si emblématique Â» indique Laurence Reibel. « Nous avons réuni nos propres collections essentiellement, qui n'étaient pas exploitées, qu'on conservait depuis des années. Dès les années 70-80 le musée a collecté beaucoup d’œuvres, notamment dans l'usine qui était désertée, et donc nous avons énormément d'archives. On espère que le public sera présent, mais on n’en doute pas trop, parce que les bisontins sont très attachés à Lip. Mais on espère bien toucher au-delà des bisontins, parce que Lip, c'était la première entreprise horlogère française » poursuit Laurence Reibel.

 

Laurence Reibel, conservateur au Musée du Temps : 

 

Cette exposition, ouverte depuis le 18 novembre le restera jusqu’au 30 juin au Musée du Temps de Besançon. Plus d’informations sur : www.mdt.besancon.fr

 

Emblématique figure du combat des LIP dans les années 1970, Charles Piaget est mort ce samedi 4 novembre 2023 à l’âge de 95 ans. Le syndicaliste a été l’un des symboles de cette lutte et d’une expérience unique d’autogestion en France. Aujourd’hui encore, 50 ans après ce combat, son nom résonne toujours à Besançon. Nous nous sommes entretenus avec Wiam Bama, jeune syndiquée à la CGT, qui souhaite perpétuer la mémoire ouvrière et l’héritage laissé par Charles Piaget.

 

« On a appris sa disparition avec une grande tristesse. Charles Piaget, faisait partie du paysage syndical et militant de Besançon. C'était un camarade. Tous les bisontins et bisontines sont endeuillés aujourd'hui. C’était une personne remplie d'humilité, qui avait un engagement sans faille. Besançon saura lui rendre cette mémoire, et continuera à perpétuer la mémoire ouvrière, notamment celle du conflit des LIP Â» indique Wiam Bama. La jeune syndiquée a découvert le combat des LIP quand elle était au lycée. « Il a été un modèle pour toute une génération, que ce soient les jeunes ou les plus vieux. Il a marqué la scène politique française et bisontine, c'est indéniable. Aujourd'hui, lorsque l'on parle de Besançon, on parle aussi des LIP et de monsieur Piaget. Â»

 

C’était il y a 50 ans. En 1973, Lip fabrique les premières montres à quartz françaises. C’est alors que les difficultés s'accentuent, en partie à cause de la concurrence américaine et japonaise. Le 17 avril 1973, Jacques Saint-Esprit, directeur général de l'entreprise, démissionne et la SA Lip dépose le bilan. Un peu plus tard, le 12 juin, lors d'une réunion extraordinaire du Comité d'entreprise, au cours de laquelle est évoqué un dépôt de bilan, des ouvriers apprennent que la direction prévoit 480 licenciements. Dans les semaines qui suivent, l'usine devient alors le théâtre d'une grève qui va connaître une audience nationale. Une grève qui est notamment menée par un membre du PSU et responsable CFDT, Charles Piaget. Le 18 juin, une assemblée générale décide la remise en route de la production, sous contrôle des travailleurs, pour assurer « un salaire de survie Â». La lutte des ouvriers de Lip est alors popularisée avec le slogan : Â« C'est possible : on fabrique, on vend, on se paie Â». Un mode de grève qui comprend pour la première fois de l'histoire, dans une entreprise, une « autogestion Â».

 

Un combat qui se poursuit

Un demi-siècle plus tard, l’héritage laissé par Charles Piaget à Besançon est toujours intact. Jeunes et moins jeunes s’en souviennent. Son nom reste gravé dans le marbre de l’histoire syndicale bisontine. « Son combat inspire la jeunesse. À l'heure actuelle, on est confronté à des enjeux sociaux et environnementaux. Son combat fait écho aux luttes d'aujourd'hui. Pour les questions de réindustrialisation, de préservation de savoir-faire, sans oublier qu'il a remis au centre des préoccupations la question des travailleurs, en tant qu'acteurs dans leur entreprise. Nous, la jeune génération, on l'a en mémoire. Le travailleur est au centre de l'économie, et nous savons que le changement sera porté par les travailleurs, pour les questions sociales, économiques et environnementales Â» souligne Wiam Bama.

 

Une lutte émancipatrice

Le samedi 28 octobre a été inaugurée à Besançon, une fresque de l’artiste bordelaise « Rouge Â», qui rend hommage aux femmes ouvrières, qui se sont engagées sans compter dans le combat des LIP. Une réalisation sur le mur d’un bâtiment, appartenant à Néolia, rue Berlioz, dans le quartier Palente. « Monsieur Piaget l'avait bien rappelé. La lutte des LIP a été une lutte émancipatrice, où les femmes ont pu prendre toute leur place. C'est aussi quelque chose d’important. Lors de cette inauguration, j’ai pu discuter avec certaines femmes qui étaient présentes. Elles nous racontaient comment ce conflit des LIP a permis de visibiliser les femmes travailleuses, les femmes ouvrières. Et en ce jour symbolique, on voit bien qu'il y a encore des choses à gagner pour l'égalité salariale, et que les luttes d'aujourd'hui, encore une fois, font écho à celles d'hier et celles des LIP Â» détaille Wiam Bama. Pour rappel, depuis ce lundi 6 novembre, les femmes en France travaillent « gratuitement Â», selon la newsletter Les Glorieuses qui lutte contre les inégalités entre les sexes.

 

La ville de Besançon a mis la salle du Grand Kursaal à la disposition de la famille de Charles Piaget. Une cérémonie aura lieu ce vendredi 10 novembre à 14h45 pour lui rendre hommage.

 

L’ex-syndicaliste bisontin de l’entreprise horlogère Lip Charles Piaget est mort le 4 novembre, à l’âge de 95 ans. Charles Piaget restera une figure du combat des ouvriers. Comme le rappelle le journal « Le Monde Â» : « il avait été le symbole d’une unique expérience d’autogestion en France Â». Anne Vignot, la maire de Besançon, a réagi à ce départ. Elle Se dit « profondément touchée Â». « Il nous laisse un héritage d’une immense richesse, celle de l’engagement et de la générosité Â» écrit Mme la Maire écologiste. Elle fait savoir que la Ville de Besançon lui rendra hommage prochainement.

Dans le cadre du cinquantenaire de la lutte des LIP à Besançon, la Grosse Entreprise et le Pôle Culture de la Ville de Besançon organisent, jusqu’au 29 octobre, « Les Instants Précieux Â». Le rendez-vous est fixé sur place des Tilleuls, dans le quartier de Palente. Le programme des évolutif. Au menu : théâtre, radio, diaporama, lecture, cinéma, apéro-concerts.

Pour de plus amples informations : www.lesinstantsprécieux.com